| Titre : | Le marteau des sorcières (Maliens Malefi-carum) | | Type de document : | texte imprimé | | Auteurs : | Henri INSTITORIS ; Jacques SPRENGER ; Amand DANET | | Année de publication : | 1973 | | Importance : | 704 | | Langues : | Français | | Catégories : | Croyance
histoire
Pensée magique
Sorcellerie
| | Mots-clés : | Sorcellerie Histoire Croyance Pensée magique | | Résumé : | Il s'agit de l'original, publié chez Pion, de la seule traduction française du célébrissime Marteau des sorcières, paru à Strasbourg en 1486 ou 1487. Le traducteur en recense, sans prétention à l'exhaustivité, 34 éditions jusqu'en 1669 : 15 entre 1486 et 1520, 16 entre 1574 et 1621, 3 de 1660 à 1669, rythme qui correspond aux grandes poussées de la sorcellerie en Europe occidentale et aux grands débats à son propos. Sprenger ne semble avoir joué qu'un rôle mineur dans la rédaction de l'ouvrage, ?uvre, pour l'essentiel, d'Institoris (vers 1430 ? vers 1505), dont M. Danet nous donne, dans son introduction, une biographie com plète. C'était une forte personnalité, qui suscita maints conflits et laissa plusieurs ouvrages polémiques. Dominicain (comme Sprenger), inquisiteur pontifical en Alle magne (comme Sprenger encore), il consa cra une partie de sa vie à la chasse aux sor cières, de l'Alsace à l'Autriche. C'est donc sur son expérience (qu'il cite abondam ment et avec un certain talent de conteur) qu'il se fonde lorsqu'il rédige le Malleus. Celui-ci est d'abord une justification. Il s'agit de montrer que les sorcières existent, contrairement aux affirmations de cer tains. Toute la première partie (et une bonne part de la deuxième) est consacrée à prouver la possibilité des actions qu'il leur attribue à la lumière de la physique du temps, à coup de citations de saint Thomas d'Aquin et de raisonnements qui emprun tent leur forme à la scolastique la plus aus tère. Par « sorcière », l'auteur entend le pire des genres de « superstition », celle qui, pour obtenir des effets praeternaturels exige un pacte explicite avec le démon, à qui l'on rend une adoration formelle accompagnée de relations sexuelles effec tives, auxquelles l'auteur accorde une grande importance. La sorcière (il s'agit presque toujours de femmes, et l'auteur trouve à cet état de fait d'excellentes rai sons théologico-morales) se caractérise par le caractère nuisible de ses actes, dont cer tains sont particulièrement horribles et constituent sa spécificité : substitution d'enfants, transformation d'hommes en animaux, castration apparente (quoiqu'il-lusoire) des mâles, destruction de récoltes, déclenchement de tempêtes, etc. Institoris est, en revanche, très discret sur « l'assem blée des sorcières », le « sabbat », qu'il ne mentionne qu'en passant et qui ne consti tue pas, pour lui, un élément essentiel. Quoiqu'il en soit, la sorcellerie est une secte organisée, avec ses procédures de recrute ment, ses rites et ses signes de reconnais sance. Elle implique l'apostasie du christia nisme. Notons enfin que la petite magie quotidienne de village, les guérisseurs et autres jeteurs de sort sont assimilés par l'auteur aux sorciers en pied : ils peuvent avoir une action bénéfique en apparence, mais ce n'est qu'une ruse du diable pour mieux préparer ses mauvais coups sous cet aspect anodin. La deuxième partie du livre décrit cer taines de ces actions typiques des sorcières : c'est la plus riche en exemples concrets. La troisième enfin examine, dans l'ordre chronologique, les étapes du procès de la sorcière, avec une grande précision : c'est un pense-bête à l'usage du juge laïque, peu habitué à ce genre d'affaires. Car si la sorcellerie, délit mixti fori, relève à la fois de l'Inquisition, des juges ecclésiastiques et laïques, c'est à ces der niers que, pour des raisons pratiques, Insti toris abandonne l'essentiel de la tâche. A condition qu'ils utilisent la procédure inquisitoriale, seule capable de confondre les coupables. La minutieuse description qu'il en fait explique pourquoi : 1) elle seule permet de vraiment prendre en compte « l'infamie », la réputation d'avoir commis le délit, en fin de compte le seul indice sérieux qu'on ait, au début de l'affaire, contre la sorcière ; 2) elle seule permet d'exercer sur l'accusée, enfermée au secret aussi longtemps qu'il faut, des Copier/Collerpressions psychologiques suffisantes Insti- toris se méfie de la torture physique ses émules ne ont pas toujours suivi sur ce point pour obtenir aveux et dénonciations des complices On regrettera que éditeur ait cru bon de reproduire sans changement la version éditée en 1973 de ce livre fondamental sans même prendre la peine de mettre jour la bibliographie La traduction rien perdu de ses qualités de rigueur et de précision En contrepartie elle ne brille pas par la facilité de lecture introduction au demeurant excellente quant elle pris de âge Car bien des ouvrages ont été publiés depuis sa rédaction qui replacent le Maliens dans son contexte et expliquent son succès Nous citerons comme relevant du sujet et parmi autres tout aussi remar quables Inner Demons de Norman Cohn Londres 1975 et The Wit ches Advocate de Gustav Henningsen Reno 1980 Le Malleus illustre magnifi quement leur thèse qui fait de la sorcellerie ici décrite une construction artificielle intellectuels phantasmant sur des pra tiques magiques courantes Nous savons par ailleurs grâce eux que Sprenger innove guère il reprend des éléments parfaitement connus de son temps lui-même ne revendique aucune origina lité Nous comprenons aussi son succès il est tout entier pensé en fonction de la pra tique judiciaire non seulement dans sa troi sième partie mais encore dans les deux pre mières qui écartent des textes gênants tel le Canon Episcopi et réconcilient avec la raison la sorcellerie sous la forme ima gine auteur donnant aux déclarations supposées des sorcières une vraisemblance qui seule rendra légalement possible leur utilisation comme preuve Car un principe fondamental du droit voulait un témoi gnage un aveu même soit frappé ipso facto de nullité en cas invraisemblance Et est sur ce point que portaient que por teront les premières attaques réussies contre le mythe de la sorcellerie Jean-Pierre DEDEEU 1294 |
Le marteau des sorcières (Maliens Malefi-carum) [texte imprimé] / Henri INSTITORIS ; Jacques SPRENGER ; Amand DANET . - 1973 . - 704. Langues : Français | Catégories : | Croyance
histoire
Pensée magique
Sorcellerie
| | Mots-clés : | Sorcellerie Histoire Croyance Pensée magique | | Résumé : | Il s'agit de l'original, publié chez Pion, de la seule traduction française du célébrissime Marteau des sorcières, paru à Strasbourg en 1486 ou 1487. Le traducteur en recense, sans prétention à l'exhaustivité, 34 éditions jusqu'en 1669 : 15 entre 1486 et 1520, 16 entre 1574 et 1621, 3 de 1660 à 1669, rythme qui correspond aux grandes poussées de la sorcellerie en Europe occidentale et aux grands débats à son propos. Sprenger ne semble avoir joué qu'un rôle mineur dans la rédaction de l'ouvrage, ?uvre, pour l'essentiel, d'Institoris (vers 1430 ? vers 1505), dont M. Danet nous donne, dans son introduction, une biographie com plète. C'était une forte personnalité, qui suscita maints conflits et laissa plusieurs ouvrages polémiques. Dominicain (comme Sprenger), inquisiteur pontifical en Alle magne (comme Sprenger encore), il consa cra une partie de sa vie à la chasse aux sor cières, de l'Alsace à l'Autriche. C'est donc sur son expérience (qu'il cite abondam ment et avec un certain talent de conteur) qu'il se fonde lorsqu'il rédige le Malleus. Celui-ci est d'abord une justification. Il s'agit de montrer que les sorcières existent, contrairement aux affirmations de cer tains. Toute la première partie (et une bonne part de la deuxième) est consacrée à prouver la possibilité des actions qu'il leur attribue à la lumière de la physique du temps, à coup de citations de saint Thomas d'Aquin et de raisonnements qui emprun tent leur forme à la scolastique la plus aus tère. Par « sorcière », l'auteur entend le pire des genres de « superstition », celle qui, pour obtenir des effets praeternaturels exige un pacte explicite avec le démon, à qui l'on rend une adoration formelle accompagnée de relations sexuelles effec tives, auxquelles l'auteur accorde une grande importance. La sorcière (il s'agit presque toujours de femmes, et l'auteur trouve à cet état de fait d'excellentes rai sons théologico-morales) se caractérise par le caractère nuisible de ses actes, dont cer tains sont particulièrement horribles et constituent sa spécificité : substitution d'enfants, transformation d'hommes en animaux, castration apparente (quoiqu'il-lusoire) des mâles, destruction de récoltes, déclenchement de tempêtes, etc. Institoris est, en revanche, très discret sur « l'assem blée des sorcières », le « sabbat », qu'il ne mentionne qu'en passant et qui ne consti tue pas, pour lui, un élément essentiel. Quoiqu'il en soit, la sorcellerie est une secte organisée, avec ses procédures de recrute ment, ses rites et ses signes de reconnais sance. Elle implique l'apostasie du christia nisme. Notons enfin que la petite magie quotidienne de village, les guérisseurs et autres jeteurs de sort sont assimilés par l'auteur aux sorciers en pied : ils peuvent avoir une action bénéfique en apparence, mais ce n'est qu'une ruse du diable pour mieux préparer ses mauvais coups sous cet aspect anodin. La deuxième partie du livre décrit cer taines de ces actions typiques des sorcières : c'est la plus riche en exemples concrets. La troisième enfin examine, dans l'ordre chronologique, les étapes du procès de la sorcière, avec une grande précision : c'est un pense-bête à l'usage du juge laïque, peu habitué à ce genre d'affaires. Car si la sorcellerie, délit mixti fori, relève à la fois de l'Inquisition, des juges ecclésiastiques et laïques, c'est à ces der niers que, pour des raisons pratiques, Insti toris abandonne l'essentiel de la tâche. A condition qu'ils utilisent la procédure inquisitoriale, seule capable de confondre les coupables. La minutieuse description qu'il en fait explique pourquoi : 1) elle seule permet de vraiment prendre en compte « l'infamie », la réputation d'avoir commis le délit, en fin de compte le seul indice sérieux qu'on ait, au début de l'affaire, contre la sorcière ; 2) elle seule permet d'exercer sur l'accusée, enfermée au secret aussi longtemps qu'il faut, des Copier/Collerpressions psychologiques suffisantes Insti- toris se méfie de la torture physique ses émules ne ont pas toujours suivi sur ce point pour obtenir aveux et dénonciations des complices On regrettera que éditeur ait cru bon de reproduire sans changement la version éditée en 1973 de ce livre fondamental sans même prendre la peine de mettre jour la bibliographie La traduction rien perdu de ses qualités de rigueur et de précision En contrepartie elle ne brille pas par la facilité de lecture introduction au demeurant excellente quant elle pris de âge Car bien des ouvrages ont été publiés depuis sa rédaction qui replacent le Maliens dans son contexte et expliquent son succès Nous citerons comme relevant du sujet et parmi autres tout aussi remar quables Inner Demons de Norman Cohn Londres 1975 et The Wit ches Advocate de Gustav Henningsen Reno 1980 Le Malleus illustre magnifi quement leur thèse qui fait de la sorcellerie ici décrite une construction artificielle intellectuels phantasmant sur des pra tiques magiques courantes Nous savons par ailleurs grâce eux que Sprenger innove guère il reprend des éléments parfaitement connus de son temps lui-même ne revendique aucune origina lité Nous comprenons aussi son succès il est tout entier pensé en fonction de la pra tique judiciaire non seulement dans sa troi sième partie mais encore dans les deux pre mières qui écartent des textes gênants tel le Canon Episcopi et réconcilient avec la raison la sorcellerie sous la forme ima gine auteur donnant aux déclarations supposées des sorcières une vraisemblance qui seule rendra légalement possible leur utilisation comme preuve Car un principe fondamental du droit voulait un témoi gnage un aveu même soit frappé ipso facto de nullité en cas invraisemblance Et est sur ce point que portaient que por teront les premières attaques réussies contre le mythe de la sorcellerie Jean-Pierre DEDEEU 1294 |
|
Affiner la rechercheLe marteau des sorcières (Maliens Malefi-carum) / Henri INSTITORIS
